Le retour du fils prodigue...(PV)

Ces dernies jours, la vie de Gabriel avait été chamboulée. Les êtres humains sont faits de telle manière que la routine les sécurise, en fait pas seulement la routine: tout ce qu'ils connaissent. C'est à un point tel que certains d'entres eux, tels Gabriel, qui avaient toujours vécu dans la souffrance étaient effrayés par le bonheur. Parce qu'ils n'en avaient pas l'habitude. Parce que c'était inconnu.

Il avait parfaitement conscient qu'il était stupide. Il avait un toit, de la nourriture, de la chaleur à portée de main et il n'en profitait pas. Et même si ça restait encore à prouver, il avait peut-être même quelqu'un qui l'aimait, lui...Cependant plusieurs obstacles le retenaient. Par exemple, la peur de souffir encore. Il avait mis tant de temps à accepter le fait qu'il était seul, qu'arriverat-il s'il s'ouvrait pour être ensuite trahis? Il souffrirait horriblement.

Et puis, si jamais il habitais dans une vraie maison, il ne pourrait plus autant aider les gens dans la rue. Beaucoup ne lui feraient plus confiance s'il devenait un bourgeois comme ils les appellaient, et ce même si il avait ainsi plus de choses à leur donner. Quant aux autres...ce ne serait plus pareil. Il n'y aurait plus de solidarité. Il ne serait plus l'un d'eux, qui vivait la même réalité qu'eux. Pour eux il ne serait plus qu'un riche qui avait pitié d'eux, or s'il y a une chose que les sans-abris détestent, c'est bien la pitié. Et puis, il ne serait plus disponible à chaque heure du jour pour eux...Non, il ne pouvait pas les abandonner.

Gabriel se refusait inconsciemment le bonheur.

Les humains sont ainsi fait qu'ils préfèrent rester dans leur merde parce qu'elle leur est familière. Il sle font parfois même inconsciemment, s'empêchant eux-même de s'en sortir sans s'en rendre compte. C'était la vie. On pouvait sortir Gabriel des ruelles, mais on ne pouvait pas sortir les ruelles de Gabriel.

Et puis...Qui serait-il, s'il n'était plus l'ange des ruelles? Quelle serait son identité? Il ne serait plus personne, son unique raison de vivre disparaîtrait et...Ça, c'était effrayant plus que tout.

Cependant, il recherchait quand-même le bonheur, à sa façon. Il voulait savoir qui était cet homme, s'il lui ressemblait, ou pas. Il était lui-même une partie de son identité, qu'il voulait découvrir. Et si, par miracle, cet homme pouvait vraiment l'aimer, être un père pour lui même...ce serait tellement bon, enfin...Alors il y alla. Il y irait rudemment, doucement, en ne faisant que des petits pas, et peut-être que l'homme se lasserait de le voir si farouche. Mais ils devaient tout d'eux s'apprivoiser, et pour Gabriel cela ne pourrait se faire que lentement, et il y aurait des embûches. Il n'y en aurait pas de faciles...C'est la vie.

C'était un bel après-midi où la température était idéale. Gabriel avait eu un client assez gentil qui l'avait bien fait manger après l'acte, ainsi l'homme ne croierait pas qu'il venait le voir juste pour de la chaleur ou de la nourriture. Il regrettait seulement de ne pas avoir pu prendre de douche ensuite, mais bon, son client ne l'avait aps trop sali alors...

Il hésita longuement sur le balcon, cela devait faire deux semaines qu'il n'était pas venu. Mais une promesse était une promesse...Et puis, il voulait vraiment voir ce que tout cela allait donnr, quitte à avoir un peu mal. Pour mourir sans regrets plus tard, sans se demander indéfiniment ce qui aurait été si...

Et puis, s'il y avait ne serait-ce qu'une petite chance qu'ilaille droit à un peu de bonheur sans nuire à personne, il se devait de la saisir. Il l'avait trop attendue.

Il cogna donc à la porte. Trois petits coups hésitants qui contenaient tout l'univers des questions...

Depuis sa rencontre avec son fils, Sariel n’avait fait que réfléchir. Que serait sa vie maintenant avec son fils ? Se réveiller le matin, faire le petit déjeuner pour deux, le conduire au lycée ou a l’unif, supporté ses petit et petite ami(e)s … Enfin l’avoir avec lui. Des engueulades entre lui et son fils comme tous parent… des choses simples, qu’il n’avait jamais vécues avec son père.

Le grand blond soupira, il nettoyait son sol, toute la maison sentait le cire d’abeille et le miel. Sariel devait faire quelque chose de ses mains et cuisiner toute la journée n’était pas vraiment une super idée, déjà que son frigo était plein a craquer. Sariel venait de sortir de sa douche quand on frappa a la porte. Il noua un essuie autour de ses hanches, les gouttes coulant le long de son torse, Sariel avait beau être a la retraite depuis près d’un an ses abdominaux et le reste de ses muscles étaient encore présent comme forgé dans l’acier. De l’acier, de la fonte, comme pour les machines de guerres. Comme Sariel.

Sariel alla vers la porte et se frottant les cheveux, lisse mais humide. Il ouvrit la porte puis ouvrit grand les yeux.

« Eh bien bonjour » dit-il en souriant « désolé d’être si peu habiller pour t’accueillir … je sors de la douche »

Sariel fit entré son fils et l’emmena dans le salon. Une fois Gabriel dans le salon, Sasa alla s’habiller et revint dans le salon s’asseyant face a Gaby.

« Comment vas-tu ? »

Une simple question trahissant son angoisse des jours passé. Il avait eu peur qu’il lui soit arrivé quelque chose. Sariel était quelqu’un d’inquiet, certes, mais la on parlait de son fils qui était plus maigre qu’un clou … Enfin … Sariel souriait et essuyait toujours ses cheveux, qui commencèrent a ondulé légèrement. Il était heureux quand même, son gamin avait tenu sa promesse et lui était revenu.

Gabriel était extrêmement gêné. Cela ne lui ressemblait pas, mais avec cet homme, il perdait tous ses moyens et avait l'impression assez fâcheuse de redevenir un gamin timide de cinq ans. Il commençait à en avoir un peu marre de régresser, franchement...

Il fut un peu surpris de le voir à moitié nu, et compris qu'il l'avait surpris dans la douche. C'était bien sa veine...Il n'aurait pas pu arriver genre dix minutes plus tard? Il aurait pu finir sa douche en paix, au moins...Enfin. Il était trop tard.

Il entra timidement dans la grande maison et le suivit docilement jusque dans le salon. Là, il s'assit sur le canapé en attendant que son père ne revienne de la chambre. Il observa les murs, les photos où Sariel posait avec des gens qu'il ne connaissait pas. Il eut la pensée brève qu'il y aurait dû y avoir plein de photos de lui sur ces murs. Mais il n'avait pas eu cette chance-là...

Il secoua la tête. Ce qu'il était bébé et sentimental! Franchement, il devait se reprendre! Il déglutit et attendit donc que l'autre revienne. Mais quand ce fut fait, il ne pu s'empêcher d'entendre toute l'inquiétude qui perçait dans la voix de l'homme pendant qu'il lui posait cette question d'apparence anodine. Il s'était inquiété pour lui. Quelqu'un c'était inquiété pour lui. Quelqu'un se souciait de lui. Woa. C'était...Troublant.

Il se tortilla un peu et répondit gauchement:

-Je...Je vais bien...Et...toi?

Sariel sourit doucement continuant de s’essuyer énergiquement les cheveux. Il étai heureux de voir son fils la assis face a lui et en ‘bonne’ santé. Sariel soupira avant de reprendre son sourire lumineux et joyeux, faisant dégager les mauvaises pensées et les inquiétudes inutiles. Sariel tendit la main et caressa doucement.

« Je vais bien »

Sariel avait toujours eu cet accent chaud de la méditerranée parfois cassée par des consonances nordiques mais le grand blond ne pouvait nier ses origines. Et son fils, son portrait craché ne pouvait a présent plus nier que Sasa, était bel et bien son père, un portrait de Sariel a 18 ans en était le témoin. Les cheveux hirsute et en bataille un sourire carnassier et joueur. L’insouciance de la jeunesse s’amusait à dire l’ancien agent.

« Qu’as-tu fais pendant tout ce temps ? »

Sariel s’informait, bon il ne doutait pas que son fils s’adonnait aux mêmes pratiques que lui a l’époque ou il vivait dans la rue … Mais il ne pouvait pas concevoir cela… Si un jour il croisait son fils avec un de ses clients, Sariel mettrait fin aux jours du dit client.

Sariel sourit et regarda sa maison puis Gabriel. Oui elle était bien plus jolie avec son fils et lui qu’avec lui tout seul. On pouvait traiter Sariel de grand sentimental, son fils lui avait énormément manqué. Et puis on ne pouvait pas en vouloir a un gamin qui avait grandi en partie dans la rue de ne pas souhaité offrir une vie descente a ses enfants.

Les joues de Gabriel rosirent un peu quand il sentit la main de l'homme caresser doucement ses cheveux et il rentra légèrement la tête dans les épaules, sans toutefois chercher à éviter le contact. Il n'avait pas l'habitude des contacts physiques, ou plutôt, il n'avait pas l'habitude des contacts physiques doux et affectueux. Il ne savait pas trop comment y réagir...

Son regard se porta discrètement sur les photos disposées un peu partout dans la pièce. Elles le laissaient perplexe. Est-ce qu'il lui ressemblait? C'était dur à dire, il ne se voyait pas très souvent dans un miroir, il n'y en avait pas vraiment dans la rue, alors...Il lui semblait pourtant que oui. Ils n'avaient pas les mêmes expressions, mais...Ces cheveux blonds dorés...Ces yeux d'un bleu si pur...C'était les siens. Il ne pouvait pas nier. Il baissa les yeux, mal-à-l'aise.

Il le fut un peu plus à la question qui lui fut posée. Il n'avait pas fait grand-chose de «bon» depuis un petit moment en fait...Que lui répondre?

-Eh bien, euh..Pas grand chose...Je vais ici et là, rien de bien intéressant. Et...Et toi, quas-tu fait de bon?

Aussi bien relancer cette conversation qui ne tenait qu'à un fil. Ils ne savaient vraiment pas quoi se dire et c'était évident...Mais quoi se dire, après tout ce temps?

Sariel sourit, le petit n’allait certes jamais lui dire ce qu’il avait fait de sa semaine. L’ancien agent s’étira avant de regarder ses photos puis son fils avant de sourire. Il avait encore toujours l’impression de se voir dans un miroir. Son loup arriva dans la pièce et se coucha sur les pieds de son maître sans gêne.

« Oh moi ce que j’ai fais ? … Bah le ménage, la cuisine, m’occuper de mes animaux, du sport … enfin des trucs a la con pour passer le temps … J’en viens a regretter l’époque ou je travaillais. »

C’est vrai que Sasa regrettait l’époque ou il faisait quelque chose d’utile de sa vie. Il en venait a regretter les jours de mission aux quatre coin du monde. Enfin … L’envie de connaître son fils était plus grande que l’envie de retourner travailler.

« Tu as faim ?»

Question automatique posé par Sariel. Vu qu’il ne travaillait plus, Sasa cuisinait, et parfois trop pour lui tout seul. Son pied hors de sa chaussure caressait le pelage de son loup en espérant que Gabriel ne soit pas effrayé par l’animal.

Gabriel écouta plus ou moins ce que disait Sariel à partir du moment ou cet...ce TRUC pénétra dans la pièce. Sur le coup, le jeune garçon cru tout d'abord que c'était un gros chien, mais la réalité le rattrapa bien vite: il n'en était rien. C'était plutôt un truc beaucoup plus dangereux et surtout beaucoup plus sauvage...

Le jeune garçon était lui aussi, en quelque sorte, sauvage. Mais il venait de la jungle urbaine, il avait grandit au milieu du béton, des arbres de métal qu'étaient les réverbères, des immenses buildings. Pour lui, l'herbe, les arbres, la nature étaient quelque chose de mystérieux, d'inconnu. Pareil pour les animaux, qu'ils n'avaient vu qu'une fois, au zoo. Enfin, sauf quelques oiseau et rongeurs, surtout des rat d'ailleurs. Mais bon, il était extrêmement éloigné de la nature, il venait d'un tout autre milieu, tout aussi dangereux mais bien différent. Et ce qui est inconnu fait peur...

Remarque que n'importe qui aurait ne serait-ce qu'un petit mouvement de recul en voyant un loup au beau milieu de son salon...Enfin.

Il remonta ses pieds du sol et serra ses genoux contre lui, se mettant le plus loin possible de son père et de l'animal à ses pieds.

-N...non, pas vraiment...J'ai mangé aujourd'hui (oui, il ne se rendait pas compte à quel point dire ça était bizarre). Mais...Euh...C'est quoi ça ><

Sariel rit et caressa son loup … C’est vrai que Ragnor n’était pas un animal très répandu. Il se redressa, son loup sautant sur le canapé et se coucha avec la tête sur les genoux de son maître.

« Cette chose, c’est Ragnor, un loup génétiquement modifier. Il possède la capacité de sentir des choses que les humains de savent pas. Il pense aussi comme nous et ressent tout nos sentiments. Par exemple si tu déprimes il vient se coller a toi et essaie de te remonter le moral. Mais tant que je ne suis pas en danger ou quelqu’un qui m’est proches l’est, Ragnor n’est un danger pour personne. »

Sariel caressa machinalement les oreilles du loup aux yeux bleu, avant d’embrasser doucement sa tête.

« C’est mon ami le plus fidèle … Je lui dois la vie a plusieurs reprise … »

Les yeux océans de Sariel rencontrèrent le saphir des yeux du loup avant de plonger dans un océan pareil au sien regardant son fils.

« Il est inoffensif ne t’en fais pas »

Sasa sourit … c’est vrai qu’il pouvait faire peur son loup.

Gabriel regarda la créature d'un regard toujours aussi incertain. Mouais. Il avait beau dire, lui, un loup qui pensait et ressentait les choses comme un humain....Il avait du mal à croire. Des vampires, des démons, des hybrides, ça passait...Mais ça...Mouais. Sans commentaire. Il avait toujours ce malaise vis-à-vis de la nature et de ce qu'elle contenait, puisque ce n'était pas son monde. Il vivait dans la jungle urbaine, faite de béton et de métal. Les plantes vertes, les animaux, c'était pas son truc, il y connaissait rien et n'avait jamais eu vraiment de contact avec eux.

Il se tassa légèrement pour mettre le plus de distance possible entre la créature et lui, mal-à-l'aise, et se racla la gorge. Il pourrait pas avoir un gentil petit Dalmatien, comme tout le monde?

-Euh...Cool!

Sa voix manquait d'assurance. Il se gratta la tête. Cette conversation ne menait à rien, c'était ridicule tout ça...

-Sa...Sariel...

Il hésita. Mais mieux valait aller droit au but et opter pour la sincérité. Il ne savait pas quoi faire d'autre de toute façon...

-Je...J'sais pas où on s'en va comme ça mais...J'veux dire...Je sais pas quoi...Dire ou...Faire...Ou juste...Comment agir...Je..Euh...Je...

Il essayait de trouver les mots pour décrire les sentiments étranges qui le contrôlaient. Mélange d'espoir fou, d'incertitude, de peur...Inconsciemment, bien sûr, il ne le savait pas, mais son coeur était partagé entre deux pôles très opposés: l'un d'eux ne voulait pas s'attacher, voulait continuer ainsi, pour être sûr de ne pas être déçu, de ne pas avoir mal. Et dans le cas où il se permettrait d'aimer, il voulait y aller prudemment, en douceur, et avoir toujours le contrôle de la situation et de ses émotions. L'autre, lui...Voulait qu'on s'occupe de lui comme un bébé, ne plus rien contrôler, se laisser faire totalement, se faire prendre en main en fait...Il voulait qu'on l'aime et aimer et avoir une confiance aveugle, dans son extrême ce pôle-là l'aurait fait monter sur les genoux de Sariel en suçant son pouce.

Il ne faut pas oublier que Gabriel n'avait jamais pu vivre son enfance et que cela commençait à se faire ressentir...Toute blessure infligée à un bébé est refoulée puis ressort plus tard. Son enfance refoulée, il devrait bien la vivre plus tard...Et vu la violence qu'il avait subit, elle pourrait ressortir de façon assez drastique.

-Je...Enfin, tu...Tu vois un peu ce que je veux dire, non? Je sais pas comment agir avec toi...Je sais pas quoi dire, je sais pas quoi faire...C'est pas que je veux pas...Je sais juste...Pas...